CfP: Colloque international
Traduire l’Autre : pratiques interlinguistiques et écritures ethnographiques
(Bologne)
Du 09 au 10 novembre 2017
Appel à communications
Il s’agit d’un Colloque international organisé par le Département d’interprétation et traduction (Università di Bologna-Forlì) en collaboration avec Do.Ri.F Università SIT – Società italiana di traduttologia. Le colloque se propose d’interroger la dimension interdisciplinaire – méthodologique et épistémologique – que la traductologie partage avec l’anthropologie et l’écriture ethnographique. Les régimes disciplinaires de traductologie et anthropologie sont, en effet, largement débattus : d’une part, le lien entre l’empirique et le théorique caractérise à la fois les discours traductologiques et les récits ethnographiques : la réflexivité propre à la traductologie, comme à l’anthropologie, est une activité critique qui invite à une théorisation des expériences incitant à l’intégration de différentes perspectives théoriques. Ella a donc à voir avec l’action (les pratiques), la production de connaissances (les théories) et la production personnelle et collective du sens, c’est-à-dire la production et l’interprétation du sens comme pratiques discursives [Lavieri 2016] ; de l’autre, les opérations traductives ne se limitent jamais à des transferts uniquement linguistiques – ce qui impliquerait une notion de sens pragmatiquement limité au contexte d’énonciation – , mais elles constituent toujours des pratiques cognitives, culturelles et sociales qui orientent et transfoment la relation, dialogique et dialectique, entre déscription et interprétation, traditions et savoirs, croyances et connaissances. Que font-ils, donc, l’anthropologue et l’ethnologue lorsqu’ils traduisent ? Qu’est-ce qu’ils choisissent de traduire : un enoncé ? un concept ? un texte ? Comment les modalités de transcription de l’oral s’intègrent-elles aux pratiques traduisantes sur le terrain ? Quel est le rôle joué par les informateurs/interprètes? Comment les différentes traductions et des traductions différentes agissent-elles sur la construction heuristique d’une altérité, sur la production et la réception des connaissances anthropologiques ?
La question de la traduction et de la comparaison des cultures a occupé, jusqu’à une époque récente, un espace réflexif important dans la littérature anthropologique, au détriment d’une analyse détailléee des modalités spécifiques par lesquelles les pratiques interlinguistiques de l’écriture ethnographique interviennent sur la production et l’interprétation des données et des théories, arrivant à souligner ainsi la nature discursive de l’authenticité culturelle. Contrairement aux traditions anthropologiques américaines et britanniques, il faut aussi rappeler que la pratique de la revisite des terrains exotiques est restée quasiment inédite dans l’anthropologie de langue française (Laferté : 2006), à l’exception de quelques cas (Houseman et Severi :1994). Souvent reléguée à une question de méthode, ou assimilée aux techniques relevant du protocole d’interview dans le travail sur le terrain (Simon : 1988), la traduction n’a, de ce fait, que très rarement joué un rôle central dans la réflexion sur les pratiques discursives des anthropologues (tedlock : 1983 ; Hanks et Severi : 2014).
Les pratiques interlinguistiques se placent, pourtant, au cœur des stratégies sémantiques et des procédures rhétoriques par lesquelles l’anthropologue construit son auctorialité discursive : les transferts linguistiques et symboliques opérés par la traduction nous renseignent sur les modalités de l’implication subjective, sur les postures énonciatives de l’écriture ethnographique. En suivant cette direction, l’analyse traductologique des journaux ethnographiques et des carnets de terrain est en mesure de nous renseigner non pas seulement sur l’observation et la collecte de données, mais aussi sur la manière particulière qu’ont les activités traduisantes d’agir sur les représentations et les interprétations des cultures indigènes. Par ailleurs, les archives ethnographiques deviennent de plus en plus accessibles, et une approche critique et génétique des « manuscrits de terrain » est maintenant possible : les chercheurs peuvent désormais jouir d’un accès privilégié aux phénomènes de surdétermination linguistique – hétéroglossie, multilinguisme, lexique emprunté aux langues vernaculaires… – des expériences ethnographiques, sur les traces des processus sous-jacents à l’invention de l’Autre.
Dans le cadre de ce colloque, nous centrerons nostre attention sur quatre espaces de réflexion qui nous paraissent essentiels : a) la relation, méthodologique et épistémologique, entre savoir traductologique et savoir anthropologique ; b) les pratiques interlinguistiques de l’écriture ethnographique et la complexité du sens dans la construction anthropologique de l’altérité ; c) l’analyse du discours anthropologique et le rôle des informateurs/interprètes d) l’analyse traductologique et génétique des journaux ethnographiques et des carnets de terrain. Nous proposons de les organiser selon les quatre axes suivants :
- Axe 1 – Entre traductologie(s) et anthropologie(s) : pratiques théoriques et savoirs disciplinaires.
- Axe 2 – Le sens en question : traductions ethnographiques et indexicalité sociale.
- Axe 3 – Anthropologie de la traduction et analyse du discours : pour une ethnographie des négociations transparentes.
- Axe 4 – Les manuscrits de terrain : pratiques interlinguistiques et genèses des représentations ethnographiques.
Mots clés : traductologie, anthropologie, ethnographie, analyse du discours, critique génétique, sens, traduction, multilinguisme, altérité.
Calendrier et modalités de soumission
15 avril 2017 : clôture de l’appel
30 avril 2017 : notifications d’acceptation